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Le radeau des illusion, Rancinan

Dossier 27 mai 2020

Ép. 7 – Les radeaux de Géricault et Rancinan

Épisode 7

Découvrez Le 7ème et dernier épisode de l'histoire des radeaux de Géricault et de Rancinan !

Exposer des objets directement tirés de l’histoire pour sensibiliser le public : l’exemple du Musée Mer Marine de Bordeaux

Comme souvent en histoire de l’art, le sujet peut être commenté, comparé et interprété sous différents éclairages. Mais dans la démarche qui consiste à rendre l’oeuvre et son univers accessibles au public, l’exposition en contexte muséal peut jouer un rôle supplémentaire.


La version du Radeau des Illusions présentée au Musée Mer Marine est une photographie sur Plexiglas (217 x 320 cm) montée sur un imposant socle noir. À ses côtés, l’artiste a souhaité ajouter une sorte de totem transparent contenant les accessoires utilisés lors de la mise en scène.

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Les accessoires utilisés durant la réalisation de l’oeuvre sont exposés à ses côtés

Bien qu’il ne s’agisse que d’objets anodins glanés par Rancinan et son équipe, ces attributs correspondent au sens que l’image leur donne ; ils sont issus de la contrefaçon, ils évoquent un contexte culturel précis ou sont des produits de marque universellement populaires. Et à la force que leur présence dégage tandis qu’on les reconnaît sur une photographie d’art grandiose, s’ajoute le sentiment étrange de leur abandon, ou plutôt de l’absence de leurs propriétaires héroïsés. Ils sont comme des reliques, les témoins d’un drame qui s’est joué dans l’ombre du passé ; on ose presque penser aux effets personnels des victimes de camps de concentration, entassés par les Nazis sur le sol avant qu’ils n’empilent ensuite les corps dans des fosses. Dénaturés, privés de leur fonction usuelle, ces objets sont comme morts et suggèrent dans l’imaginaire du spectateur la disparition tragique de leurs propriétaires, en l’occurence les migrants en quête du paradis occidental.


Le Musée Mer Marine n’expose pas Le Radeau de la Méduse, mais dispose dans ses collections d’un objet spectaculaire ayant appartenu au fils de son commandant : un coffre de grande taille abritant la précieuse collection de coquillages constituée par Jean-Daniel Coudein, fils de l’aspirant de première classe dont le destin fut de commander pendant 13 jours le radeau le plus célèbre de l’histoire de la marine française.

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Collection de coquillages constituée par Jean-Daniel Coudein (1827-1901), fils du commandant du Radeau de la Méduse et capitaine de vaisseau, Bordeaux, Musée Mer Marine

Présentant des spécimens issus de toutes les mers du globe, cette collection se répartit sur quatre niveaux de rangement composés d’environ 48 logements chacun. Elle a été conditionnée dans du coton hydrophile et documentée avec soin, chaque coquillage ou presque ayant reçu une étiquette nominative parée d’une écriture à l’encre fine.


Jean-Daniel Coudein père termine sa carrière comme major du port de Rochefort au début du Second Empire ; son fils suit la tradition familiale en faisant carrière dans la marine. Cette collection, que les Coudein se transmettent de père en fils tout comme leur vocation maritime, est un témoin émouvant de l’attachement de cette famille à la mer.


Support à un travail de mémoire autour d’une tragédie majeure de l’histoire de la navigation, elle est aussi une relique chargée d’histoire qui exerce aujourd’hui son magnétisme sur le public du Musée Mer Marine.

Sarah Barry