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Lifestyle 28 avril 2020

Covid-19 : La ré-appropriation du littoral vue par Thomas Joncour

[Interview]

Thomas Joncour, moniteur de surf, a accepté de répondre à nos questions.

Dans la continuité de notre dossier spécial sur la ré-appropriation du littoral vue par les acteurs économiques locaux, découvrez l’interview de Thomas Joncour :

  • Bonjour Thomas, peux-tu te présenter rapidement, toi et ton activité ?

« Je m’appelle Thomas Joncour, je suis surfer mais aussi moniteur et co-gérant du 29 HOOD surf club. » 

Découvrez son école de surf en Bretagne !

« Je passe le confinement chez moi à Penmarch en pays Bigouden, tout au bout du Finistère en Bretagne (le plus beau des pays). »

  • Que fais-tu pour compenser ?

« Je surfe en cachette (je rigole…) Je ne compense pas du tout, je m’ennuie vraiment et j’ai l’impression que tous ceux qui ont développé une passion pour le jogging et les abdos sont des vendus *rires*. J’ai pris 7kg, je joue à la console (heureusement j’en ai trouvé une avant le confinement), j’essaie d’imaginer des stratagèmes pour briser le confinement et je me plains de la politique (comme toujours)… Ah oui, et je n’aime pas jouer à un jeu ou on ne gagne jamais ! *rires*. Je promène les chiens et j’appelle les copains. Finalement, je m’endors tard et je suis plutôt tendu. » 

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Thomas Joncour, champion de france Master 2019 à Seignosse
  • Comment se passe ton confinement ? Comment a-t-il impacté ton quotidien ? 

« Ça se passe, après il y a toujours pire. On a un jardin on est quatre en comptant mon beau frère et ma belle sœur. On a des interactions, tout le monde se connaît dans le quartier et on est solidaires. C’est vraiment une bonne chose. Les gens ont bien respecté le confinement et ce n’est pas très urbanisé ici. On n’a donc aucun cas de Covid-19 dans la commune. »

« Je continue mon activité de sauveteur bénévole à la SNSM. On a été appelé deux fois pendant le confinement pour des interventions sur des bateaux de professionnels qui ont le droit de sortir en mer. Je me suis inscrit sur la réserve civique de la mairie pour être bénévole et assister des personnes isolées : changer le gaz, faire leurs courses, etc. »

« Le confinement impacte mon quotidien car je suis quelqu’un de très sociable et de chaleureux. Hors de question de prendre quelqu’un dans ses bras pour le saluer ! Et on ne voit personne, ce qui est très frustrant. »

« Mes journées je les passe sur la plage depuis toujours pour travailler ou pour pratiquer c’est le problème du « travail-passion ». Je n’ai pas d’autre activité qui me motive malheureusement donc je suis un peu oisif à la maison et je me sens prisonnier. »

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Thomas Joncour, En plein cours de surf, spirit partage et convivialité résument parfaitement l’esprit qu’il véhicule.
  • Comment imagines-tu la sortie ? 

« Je pense que ça va faire bizarre. Comme je l’évoquais ci-dessus, je vis dans une petite commune et tout le monde se connaît. On va devoir prendre nos distances et être plus méfiants. J’espère surtout qu’on va sortir très vite de cette situation. Ici on est sur une péninsule, la pointe de Penmarch. Il y a la mer partout, c’est tantôt une chose magnifique et tantôt un élément furieux qui menace d’envahir les terres. Plus de 70% des emplois dépendent de la mer. Je comprends qu’à paris ils ne puissent pas réaliser que la seule chose qu’on a sur la commune ce sont des plages et des rochers et qu’on ne peut plus y accéder. Bref, cela affecte vraiment les gens ici mais le dé-confinement se passera bien car je sais que les gens sont responsables et feront de leur mieux. »

  • Une fréquentation responsable des plages est-elle possible ?

« Oui ! Les plages sont grandes en tout cas chez nous elles le sont. Il y a énormément de plages et j’ai rarement vu ici des serviettes collées ou des gens les uns sur les autres. La plage ici ce n’est pas forcément un lieu où l’on s’installe. C’est même rare en dehors de la période estivale de voir des gens bronzer. On se balade, on fait du sport, on sort en mer et on va surfer. C’est un lieu de passage mais je pense que même en période de pointe, passer du temps sur la plage en Bretagne est moins dangereux que d’aller au supermarché. »

  • Que penses-tu de l’interview de Guillaume Barucq ?

« Je pense que c’est un sujet qui lui tient à cœur. Il a dit tout haut ce que les passionnés pensent tout bas. Bien sûr tous les surfers sont dégoûtés car l’océan n’est pas un endroit à risque pour la propagation et depuis le début du confinement on peut voir des regroupements dans les grandes villes où certains ne jouent pas le jeu. Mais tout le monde faisait attention car se plaindre c’était tout de suite être égoïste, voir terroriste. »

« Il a expliqué avec des arguments sanitaires solides les raisons d’une reprise maîtrisée et instantanée. Il a ajouté une manière politisée à son discours un peu plus subtile que la manière des purs passionnés. J’espère que ça nous aidera à nous faire entendre. J’ai vu que son image avait énormément circulé sur les réseaux des initiés ces derniers temps. Si on peut retourner à l’eau grâce à lui, il deviendra une légende. Il aura devancé la fédération qui aurait dû être plus efficace et active dès le début. Merci pour son engagement. Je pense qu’il a pris des risques aussi en mouillant le maillot de devenir un paria c’est un résistant »

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© 29 HOOD surf club
  • Souhaites-tu réagir à un sujet en particulier ?

« Je trouve que la crise en haut lieu est très mal gérée. Quand je donne un cours de surf, je suis au courant des dangers qui peuvent menacer mes élèves, des éventuels accidents qui auraient pû se produire auparavant au cours de mon travail, ma pratique, dans d’autres structures où sur d’autres spots. Je mets tout en œuvre pour que mon cours se déroule bien et que ceux sous ma responsabilité soient en sécurité. Si un élève se noie pendant mon cours suite à un défaut de prévention je vais en prison c’est clair et net ! »

« Là, le gouvernement a été incompétent. il sait que le plus grand risque pour l’humanité est la pandémie. Des gens sont morts, le pays se noie économiquement et ce n’est pas fini ! J’espère que les français se rappelleront de ça, mais surtout que les responsables d’aujourd’hui seront traduits en justice pour tout le mal fait à la France et pour leur incompétence. »

• Y a-t-il tout de même des points positifs à souligner ?

« Je suis heureux de voir que l’on réalise ce qui est important, de voir les gens unis pour une cause commune, par exemple la revalorisation des soignants. On est tous égaux face à la maladie. Et c’est surtout la reprise rapide de la nature sur le monde des hommes, par rapport à la pollution par exemple. »

« J’ai parlé à un vieux pêcheur avant hier. Il me disait que depuis 1963 il n’avait pas vu une si longue période de vent de terre en Bretagne ! La nuit on entend beaucoup les animaux et on retrouve des requins pèlerins dans la rade de Brest. J’espère que l’on continuera à faire des efforts dans cette direction et que le gouvernement nous soutiendra. »